Les chroniques de Nolwenn
Auditeurs d’enfants : des interlocuteurs privilégiés pour les mineurs

6 décembre 2023

Recueillir la parole d’enfants mineurs est une tâche délicate, que ce soit dans un cadre amiable ou lorsqu’un juge aux affaires familiales ou un juge des enfants doit statuer sur une affaire les concernant. Comment écouter et protéger les enfants qui sont souvent tiraillés entre ce que veulent chacun de leurs parents ? C’est là qu’interviennent les auditeurs d’enfants, méconnus du grand public, ils permettent cependant aux enfants de prendre la parole.

L’enjeu incontournable des auditeurs d’enfants

En 2020, plus de 300 000 mineurs étaient concernés par une mesure de protection de l’enfance[1] ! Si l’on ajoute à cela les procédures de séparation (divorces, PACS et ruptures de concubinage), on atteint des sommets. Ces chiffres montrent à quel point il est important de se mettre en position d’écoute face aux mineurs pour comprendre leurs problèmes, leurs doutes et leur donner un moyen de les exprimer.

Les cas nécessitant une intervention ou une assistance des services juridiques sont nombreux. Des litiges familiaux lors d’une procédure de divorce jusqu’aux enfants en danger subissant la maltraitance, il n’est pas rare de devoir écouter les enfants pour prendre une décision qui satisfasse les besoins de l’enfant.

Selon le contexte, le juge des enfants peut mettre en place un accompagnement éducatif dans des domaines tels que la santé, la sécurité ou l’éducation. Il peut aussi aller jusqu’à retirer le mineur de son environnement familial si cela s’avère indispensable. Mais dans tous les cas, l’objectif est toujours d’agir dans l’intérêt supérieur de l’enfant. C’est pour cela que la prise en compte de son témoignage est indispensable.

Le rôle des auditeurs d’enfants : recueillir la parole des enfants

Le domaine d’activité des auditeurs d’enfants est extrêmement vaste car l’enfant peut être entendu dans différentes procédures judiciaires (devant le Juge aux affaires familiales, le juge des enfants, etc.), mais aussi dans le cadre amiable (négociations, MARD, procédure participative, etc.) ou même en-dehors de toute procédure, quand le recueil de sa parole est nécessaire.

Il est donc primordial de permettre à chaque mineur d’être entendu dans les meilleures conditions.

Les auditeurs d’enfants sont spécialement formés

Afin de faire respecter les droits de l’enfant, encore faut-il pouvoir échanger avec lui d’une manière adaptée. Il est ainsi nécessaire de posséder certaines qualités comme des compétences sociales, humaines, juridiques et aussi et surtout de l’empathie.

C’est alors qu’interviennent les auditeurs d’enfants. Il s’agit le plus souvent d’avocats de profession qui ont suivi une formation spécifique afin d’être en mesure de répondre aux besoins des enfants.

La neutralité : une disposition essentielle pour un auditeur d’enfant

Bien sûr ce professionnel ne doit être ni juge ni partie dans le cadre des procédures liées à des problématiques familiales ou même des pourparlers entre les parents. Au contraire, son rôle est d’adopter une posture de neutralité vis-à-vis de l’affaire en cours. Rappelons que son but est de simplement être le porte-parole de l’enfant.

La posture d’écoute des auditeurs d’enfants

Dans le cadre des procédures judiciaires ou dans des processus amiables, les parents de l’enfant peuvent faire appel à l’auditeur d’enfants afin de faciliter la prise de parole de leur enfant. Pour ce dernier, il peut être plus facile d’échanger avec un tiers neutre qu’avec ses proches. Toutefois, ce processus est délicat et ces experts de l’écoute allient pour ce faire bienveillance, précision, impartialité et compétences en psychologie.

Les compétences reconnues des auditeurs d’enfants

Pour s’assurer notamment que les auditeurs d’enfants bénéficient de formations complètes et pertinentes, certains professionnels du droit ont créé un cursus approprié en partenariat avec l’Institut du Droit de la Famille et du Patrimoine (IDFP).

Afin de former les futurs auditeurs d’enfants, la Faculté de Droit des Facultés de l’Université Catholique de Lille (FLD) et l’lDFP ont ainsi élaboré conjointement le diplôme universitaire Auditeur d’enfants.

Cette formation pluridisciplinaire exigeante explore des thèmes variés :

  • Droits de l’enfant ;
  • Psychologie de l’enfant et de l’adolescent ;
  • Sociologie de la famille ;
  • Définitions et procédures du dispositif auditeurs d’enfants ;
  • Pratiques professionnelles de la fonction.

Quand et comment un enfant peut-il être entendu ?

Avant et pendant une audience, un enfant mineur a le droit d’être entendu si ce dernier est concerné par un litige familial le concernant. Si le divorce et la question de visite et d’hébergement de l’enfant font bien entendu partie des situations où le mineur a voix au chapitre, le recueil de son ressenti ne s’y limite pas.

Comme l’énonce l’article 388-1 du Code civil : “ Dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut, sans préjudice des dispositions prévoyant son intervention ou son consentement, être entendu par le juge ou, lorsque son intérêt le commande, par la personne désignée par le juge à cet effet. ”

Qu’il soit en détresse ou en conflit avec ses parents, ou qu’il désire donner son avis dans le cadre de la fixation de sa résidence, l’enfant a donc une voix à faire entendre. Les juges y font généralement droit, sauf à ce que l’enfant soit trop jeune, non capable de discernement.

Dans la majorité des cas, les auditeurs d’enfants ont donc la capacité d’accompagner l’enfant dans sa prise de parole. Ce dernier aura alors l’opportunité d’exprimer ses craintes ou ses espoirs face à un professionnel qui saura trouver les mots pour échanger avec lui et les restituer correctement.

Dans le cadre amiable et bien que le juge soit absent, le recours à un auditeur d’enfant est un vrai plus quand il faut recueillir de manière neutre le ressenti des enfants sur ce que les parents ont imaginé pour eux dans l’accord qu’ils dessinent, sans pression, en évitant autant qu’il est possible de le les placer en plein conflit de loyauté.

Ce type de processus est un bienfait, car il apaise les situations de conflit et facilite le travail de la justice pour trouver une solution qui convienne à chacun. En effet, la meilleure solution reste celle à l’amiable, trouvée ensemble, d’un commun accord, en respectant les besoins de chacun.

 

[1] Observatoire nationale de la protection de l’enfance, Infographie sur les chiffres clés en protection de l’enfance – Chiffres pour l’année 2020, 2020

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